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amitié

  • La théorie de la tartine, Titiou Lecoq

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    On avait laissé Titiou Le coq avec ses Morues, il y a quelques années. Un savoureux premier roman doté d'une charmante désorganisation apparente. On la retrouve avec La Théorie de la Tartine, ou l'évolution de nos pratiques quotidiennes en 10 ans de banalisation d'internet. Relations, business, rapport aux médias,  horizontalité de la parole, les personnages du roman font tous face à des domaines qui évoluent au rythme du big data.

    Comme dans Les Morues, on retrouve une association hétéroclite mais efficace de personnages, liés par internet. Un web-journaliste, une étudiante en proie aux premières porn revenge de l'histoire, un hacker adolescent associal et en rupture avec ses parents. Liés par une première affaire en 2006, on les retrouve 10 ans plus tard, toujours solidement accrochés au rocher internet. Mais en 10 ans, l'outil a fait du chemin.

    Comme dans son premier roman, la blogueuse, geek et web-journaliste Titiou Lecoq sait allier humour et sujets plus profonds (il était question de viol et de partenariats-public-privé dans les Morues !). Véritable réflexion sur la toile, La Théorie de la tartine est aussi un roman léger et plaisant, dont les relations humaines, finement observées, constituent l'épicentre.

    La théorie de la tartine, Titiou Lecoq (France). Le livre de poche. 416 pages. 7, 30 €

    En 2013, Fais-moi les Poches ! avait rencontré Titiou Lecoq pour parler des Morues : c'est ici !

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  • Nous sommes les oiseaux de la tempête qui s'annonce, Lola Lafon

    002912037.jpgEmilienne et la narratrice sont des amies, des vraies. Elles partagent la même expérience de la vie, qui semble les souder à jamais, sans que cela ait besoin d'être formulé. Elles sont jeunes. Rien ne prédispose donc Emilienne à s'effondrer en pleine journée, en buvant un chocolat chaud dans un bistrot avec le jeune garçon étranger qu'elle aide à faire ses devoirs. Le coeur bat. Et puis il s'arrête. Comme ça.

    Black out, réanimation, espoirs, doutes, guérison, opération, inquiétude : les phases se succèdent, l'expectative demeure. La narratrice est là, fidèle, au chevet de son amie. Au gré des visites à l'hopital, elle continue à vivre et rencontre un autre "oiseau" sauvage, une jeune fille énigmatique qui elle aussi dévore à la chaine les séances de Ciné-Club. 

    Chacune des trois jeunes femmes est une ligne brisée. Elles se rencontrent, s'entrechoquent, portant des fardeaux lourds et qui font d'elles des personnes sans concession. Pas de paix sans justice. Elles n'ont pas eu de justice, elles cherchent donc leur paix, chacune à sa façon.

    Plongée dans un univers, une ambiance, une révolte permanente où le rapport entre norme et vertu est bien loin d'être évident. Un roman comme un gros coup de gueule, une colère qui bout, une promesse d'intranquillité pour les bourreaux en tous genres.

    Nous sommes les oiseaux de la tempête qui s'annonce, Lola Lafon (France). Babel. 432 pages. 9, 70 €

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  • En ville, Christian Oster

    002688120.jpgSi vous êtes friands de nouvelles façons d'écrire, de styles différents, ce roman entre dans vos critères.

    Au départ, un groupe d'amis, quinqua voire sexagénaires, parisiens. Ils se voient peu, se connaissent peu, mais se retrouvent annuellement autour d'un projet commun : leurs vacances estivales, ensemble. Certains sont en couple, d'autre séparés, en voie de l'être, entre deux déménagements, entre deux âges. Le consensus entre eux est minimal : l'été, le soleil. Il ne vient à l'esprit d'aucun d'eux de rompre ce terrain d'entente en s'engageant dans une relation plus poussée, plus intéressée, plus généreuse. Et cela fonctionne.

    Evidemment, un jour le statu-quo prend du plomb dans l'aile suite à un événement inattendu. Les relations vont évoluer, pas toujours dans le sens que l'on attendrait.

    Christian Oster réussit à nous faire pénétrer très intensément dans les pensées et les atermoiements de son narrateur. Un tour de force incroyable qui semble vraiment rendre compte du cheminement, confus mais naturel, de la pensée, des humeurs. On lit dans les pensées, on lit les pensées. Elles ne sont ni héroïques, ni audacieuses, ni toujours passionnantes. Mais c'est éminemment réaliste, fascinant aussi. Quant au roman en lui-même, c'est un objet de curiosité, une véritable expérience littéraire.

    En ville, Christian Oster (France). Points. 192 pages. 6.30 €.

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  • Des vies d'oiseaux, Véronique Ovaldé

    disparition, amitié, Amérique du sud, familleCap vers l'Amérique du sud. Bel oiseau, oiseau de nuit, ici comme ailleurs, nul ne souhaite vivre derrière des barreaux. Même les oiseaux de paradis dans les cages dorées, dont fait partie Paloma, gosse de riche à qui rien ne manque, ont parfois besoin de prendre l'air, de quitter le nid. Alors la jeune fille s'envole, encanaillée avec un jeune et rêveur voyou, qui, comme sa mère, est originaire des contrées honteuses et poisseuses d'Irigoy. Oiseau de malheur que ce jeune homme ? Pas si sûr. Il vient remplir une vacuité douloureuse pour Paloma, dont la meilleure amie a perdu la vie.

    Et pendant que Paloma s'envole, sa mère, Vida, commence à respirer aussi, s'éloignant pas à pas d'un univers mensonger. Le portrait de famille prend certes du plomb dans l'aile, mais Gustavo, le père de famille, continue à conduire sa grosse voiture noire allemande. Imperturbable.

    Des vies d'oiseaux, Véronique Ovaldé.  J'ai lu. 250 pages. 7, 60 €

    Si vous avez aimé Des vies d'oiseaux, vous aimerez peut-être Banquises

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  • Jusque dans nos bras, Alice Zeniter

    Ca va vous sembler stupide mais j'ai mis un certain temps à retrouver où j'avais entendu cette bribe de phrase "jusque dans nos bras". Et puis j'ai trouvé, une fois la dernière page de ce roman passée. Oui, la Marseillaise ! Un hymne à la patrie, à l'unité de la nation devant l'adversité (aux paroles saisissantes de... détermination, faut-il le rappeler ? Oui appelons ça comme ça, de la détermination...) Un haka bien stimulant pour résister aux hordes tyranniques et sanguinaires, cette chanson. Bon, c'était peut-être utile au 18ème siècle, on trouvera certainement certains passages un chouilla excessifs en 2013.

    Bref, je m'égare.

    Nous sommes en France, novembre 2013. Notre nation est tellement évoluée qu'une de ses ministres subit publiquement le racisme le plus vil, le plus bas, le plus fétide. Comment en est-on arrivé là ? peut-on légitimement s'interroger. Nous aurions donc la mémoire si courte que nous aurions oublié qu'en 2007, à l'arrivée d'un nouveau Président de la République et de son gouvernement, un "ministère de l'identité nationale" aux relents pétainistes a été créé. Et pendant cette période, des gens ont vécu dans ce pays, avec la peur au ventre.

    C'est ce que rappelle Alice Zeniter dans ce roman très inspiré de l'actualité du quinquennat Sarkozy. A travers les aventures d'Alice et Mad, qui vont faire de leur union le plus blanc des mariages pour tenter de faire passer inaperçue la peau noire de Mad. Les amis d'enfance se jettent à corps perdus, mais pétris de questions, dans cette aventure qui leur semble injuste, mais pas si étonnante, puisqu'elle s'inscrit dans la grande lignée de l'histoire du racisme qu'ils écrivent ensemble depuis les bancs de la maternelle. Depuis le mot "bougnoule", depuis la haine anti-arabe de l'après 11 septembre 2001.

    Avec un humour incroyable, Alice Zeniter réussit la performance de la simplicité de la démonstration sans grand discours. Et nous rappelle qu'un roman, ça peut faire travailler un peu la compassion.

    Jusque dans nos bras, Alice Zeniter (France). Le livre de poche. 192 pages. 6, 60 €

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  • Les séparées, Kéthévane Davrichewy

    amitié,amour,coma,adolescence, vie adulteLa famille, les amours, l'amitié. Ainsi se résume la trilogie affective des vies humaines. Pour Alice et Cécile, les deux femmes qui occupent la première place dans ce roman, les amours auront été, au cours des longues années de leurs existences, fluctuantes, tandis que les rôles de leurs familles et de leur amitié auront traversé sans broncher -ou presque- les changements sociétaux, politiques, ou culturels de leur pays, la France. De mai 1981 aux smartphones, les amies grandissent, mûrissent, vieillissent ensemble, se désillusionnent et s'enthousiasment au gré des événements. Se serrent les coudes. Et puis un jour -gâchis- s'éloignent.

    Quand Cécile se retrouve emmurée dans une chambre d'hôpital suite à un accident de voiture, y aura-t-il quelqu'un pour penser à prévenir Alice, après toutes ces années ? Y aurait-il eu entre elles des omissions ou des mensonges plus graves que d'autres ?

    Kéthévane Davrichewy propose au lecteur une place atypique, car la narration l'amène tour à tour dans les pensées comateuses de Cécile et dans la chronologie de l'amitié entre les deux femmes. On peut s'y perdre un peu au cours des premières pages, pour se retrouver fasciné par la complexité -et l'évidence, à rebours- du dénouement.

    Les séparées, Kéthévane Davrichewy (France). 10/18. 163 pages. 6, 60 €

    Catégories : Livre 5 commentaires
  • Et rester vivant, Jean-Philippe Blondel

    41jcC3LZ2sL._SL500_AA300_.jpgBien sûr qu'on les connaît les différentes étapes du deuil. Bien sûr, ça arrive à tout le monde d'avoir à les subir. Bien sûr, le spectacle continue. Ce roman nous interroge sur comment il continue justement, ce fichu spectacle. Sur le sens à donner aux choses quand tout se remplit de vide, d'absence. Quand les couleurs s'en vont.

    Le narrateur a 22 ans et se retrouve privé en quelques années de tous les membres de sa famille proche : mère, frère, père. Nous sommes en 1986, et il va choisir de filer vers l'ouest, accompagné de ses deux meilleurs amis. Aller voir ailleurs, comment c'est, le vide. A cause d'une chanson de Lloyd Cole, c'est sur les routes de Californie, au volant d'une Thunderbird climatisée, qu'il va tenter de reprendre du souffle. Ou peut-être de toucher le fond de la piscine pour enfin espérer remonter à la surface.

    Jean-Philippe Blondel -puisque l'auteur et le narrateur ne font qu'un dans ce texte autobiographique (voir entretien ci-dessous)- prend le lecteur à témoin, l'immerge dans le voyage. Nous sommes là, à ses côtés, dans la chaleur des déserts américains, à assister impuissants à une souffrance singulière. Comme le narrateur, nous frisons l'apoplexie. Comme lui, nous vaquons de souvenirs heureux, banals, désagréables, au retour à la réalité. On aimerait avoir fait un cauchemar. Lui aussi. Mais non.

    Ce roman évoque la douleur du deuil avec délicatesse. Il y est aussi question d'amitié, de liens qui sauvent, de rencontres improbables et bienvenues. D'inconnus sur la route, d'hésitation, de renaissance.

    Splendide.

    Et rester vivant, Jean-Philippe Blondel (France). Pocket. 168 pages. 6, 10 €


    Catégories : Livre 1 commentaire