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Fais-moi les poches !

  • Pactum Salis, Olivier Bourdeaut

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    Dans les marais salants de Guérande, le travail du paludier s'inscrit dans la carte postale chérie par le touriste. L'homme exerçant une tâche ancestrale hautement délicate et exigeante, dans un décor parfaitement singulier, obéissant à des règles strictes et ingénieuses héritées de la nuit des temps. A la clé, la récolte d'un bien demeuré précieux malgré les changements d'ères.

    C'est le cadre de travail de Jean, trentenaire un peu sauvage qui a trouvé dans ce labeur la satisfaction quotidienne de produire, en collaboration étroite avec le vent et le soleil, le précieux sel connu de tous. Le décalage entre la renommée de sa production et la rémunération qu'elle lui procure est immense, mais ce contemplatif a des besoins spartiates qui s'accommodent sans rechigner de cet aléa. Ne comptent pour lui que son gros sel, et sa fine fleur estivale.

    Alors quand il rencontre Michel pour la première fois, ça ne va pas bien se passer. Mais alors pas du tout. Michel, c'est un flambeur en villégiature à La Baule, tombé par erreur dans cette arrière-cour des plages de sables fins et des palaces, que sont pour lui les marais salants. Tombé au sens propre. Sur un tas de sel de Jean. Ivre et en pleine nuit, il a souillé la production si chèrement acquise. Sa Porsche, garée de guingois entre deux oeillets, symbolise à elle seule le fossé entre les valeurs des deux hommes. Malgré ces différences, Michel va devoir accepter le pacte que Jean lui propose, en compensation de son incivilité. Un pacte de sel qui laisse présager de nombreuses déconvenues et des situations détonantes.

    Les lecteurs déjà conquis par En attendant Bojangles retrouveront la fantaisie d'Olivier Bourdeaut dans Pactum Salis. Pour tous les autres, c'est une occasion de découvrir ce auteur dans un récit à l'avant-goût d'été.

    Pactum Salis, Olivier Bourdeaut (France). Folio

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  • Les Mange-Rêve, Jean-Luc Le Pogam

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    2034. Une période de froid extrême s'abat sur l'Europe, condamnant les calmes rivages de l'ouest à se figer dans la glace la plus épaisse. Car le climat, au même titre que d'autres mesures, est un bon moyen de contrôler les populations trop avides de liberté. Bogdich, le président, ne se prive pas des atouts technologiques à sa disposition pour réduire en cendres tout embryon de liberté. Après s'être attaqué au climat, il anéantit toute possibilité de rêver ou de penser. Ses redoutables brigades Mange-Rêve traquent les sources de plaisir et de connaissance : livres, musique, journaux sont des armes anti-régime traquées dans les moindres recoins. Leurs propriétaires s'exposent au pire.

    Dans cet environnement impitoyable, trois amis adolescents se retrouvent en première ligne. Leur prof de guitare a été sauvagement agressé, les parents ne donnent plus signe de vie, et le beau-père de l'un des trois serait membre des milices Mange-Rêves ! Accompagnés de deux grands-pères au passé d'aventuriers surentraînés, ils vont traverser la glace à bord de cataskis -le nouveau nom donné aux catamarans en cette période cauchemardesque où l'eau n'existe plus qu'à l'état solide- pour échapper aux tyrans et retrouver leurs proches. Mais bien des embûches parsèment leur aventure à la voile, et l'équipage, en route vers le nord, aura à subir bon nombre d'avaries.

    Roman d'aventures et d'initiation à destination des adolescents, les Mange-Rêve, comme tout bon roman d'anticipation, propose aussi une réflexion sur la liberté et le pouvoir. Un souffle d'air (très) frais à recommander également aux adulltes.

     

    Les Mange-Rêve, l'Enfer Blanc (Tome 1 de la trilogie), Jean-Luc Le Pogam.

    Editions Slalom

    Catégories : Littérature Française, Littérature jeunesse 0 commentaire
  • Faux départ, Marion Messina

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    On ne se retourne pas sur Aurélie si on la croise dans la rue, il ne faut pas non plus compter sur elle pour mettre l'ambiance dans une soirée. Aurélie est une discrète, voire une invisible, une solitaire. Issue d'un milieu modeste, promise par ses capacités scolaires à une école que ses parents la dissuaderont d'intégrer, Aurélie éprouve au plus profond l'expérience de l'ennui, le vrai, sur les bancs de la fac, comme dans la vie en général. De Grenoble, elle déplace son ennui à Paris, une ville-ogresse qu'elle conspue tout en en devenant intimement dépendante.

    Entre les deux villes, il y a eu la rencontre avec Alejandro, un étudiant colombien qui fait s'éloigner l'ennui en faisant battre son cœur. Amoureuse, elle est aussi ouverte au monde par cette rencontre : cinéma, musique, débats redonnent du sens à son existence. Mais les contes de fées ne sont pas si fréquents, et Aurélie fait l'épreuve de l'entrée dans la vie professionnelle. Déception amoureuse, boulots mal payés, exigeants en horaires et en déplacements, peu reconnus, aiguisent son regard sur la société qui l'entoure.

    Roman d'initiation très éloigné de l'eau de rose, Faux Départ fait la part belle à un style incisif et direct, d'une modernité absolue dans son regard et ses réflexions.

    Faux départ, Marion Messina (France). J'ai lu..

    7, 10 €. 221 pages

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  • L'autre moitié du soleil, Chimamanda Ngozi Adichie

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    Dans le Nigeria des années 60, la vie intellectuelle bouillonne dans une classe supérieure avide de débats. C'est dans ce décor que l'on fait la connaissance d'Olanna, fille d'un riche industriel, et de sa sœur jumelle, Kainene. L'une vit avec Odenigbo, un universitaire très soucieux du devenir de son pays et des liens avec l'Occident, l'autre partage sa vie avec Richard, un journaliste britannique imprégné de la culture locale. Témoin de leur quotidien, mais avec le regard d'une autre classe sociale, le jeune et inexperimenté Ugwu a quitté son village pour servir Odenigbo.

    Une famille dans son époque. Mais pas n'importe laquelle. Une époque qui va être très secouée par les événements. Les tensions ethniques se renforcent et vont amener à la création d'un état indépendant du Nigéria : le Biafra.

    Et c'est l'installation progressive de l'état de paix à l'état de guerre que suit ce roman. Le déplacement du seuil de la normalité, des priorités, la banalisation d'un quotidien fait de bunkers, d'enrôlements de force, de bombardements, d'éxécutions, de perte de vue des proches, de marché noir, d'humiliations, de viols. Olanna, Kaienene, Ugwu : le lecteur est tous ces personnages à la fois. Des personnages que rien n'avait préparé à ça.

    Fresque magistrale, L'autre moitié du soleil est une immersion romanesque et un récit-témoignage édifiant.

    L'autre moitié du soleil, Chimamanda Ngozi Adichie (Nigéria).

    672 pages. 10, 80 €

    Catégories : Littérature Africaine 0 commentaire
  • Captive, Margaret Atwood

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    Dans le Canada du 19ème siècle, une jeune servante, Grace Marks, est reconnue coupable du meurtre de son employeur et de sa maîtresse, employée de maison elle aussi. A 16 ans, le jeune fille est condamnée à ne connaître que le pénitencier, jusqu'à la fin de sa vie. Des événements, elle ne conserve en mémoire que des perceptions annexes. Le Dr Jordan, jeune psychiatre féru de techniques novatrices, prend à cœur le dossier de Grace, troublé par son amnésie, dont il aimerait comprendre si elle est un mensonge qui renforce sa culpabilité ou, au contraire, une des clés de son innocence. De leurs entretiens réguliers surgit le passé de Grace, son émigration depuis l'Irlande, la traversée de l'Atlantique avec son lot de traumatismes, ses rapports avec son père, sa meilleure amie Mary. Comme une pelote qui se déroule au fil des pages, le récit semble avancer vers la vérité. Le lecteur l'attend, indécis, mal à l'aise, dans une proximité troublante avec Grace et le Dr Jordan.

    Captive, Margaret Atwood (Canada). 10/18.

    613 pages. 8, 80 €

     

    Catégories : Littérature Canadienne 0 commentaire
  • Un océan, deux mers, trois continents, Wilfried N'Sondé

    esclavage, récit initiatique

    Nsaku Ne Vunda est né à la fin du 16ème siècle dans le royaume du Kongo. Ordonné prêtre, il va recevoir mission par son roi d'aller rencontrer le pape, à Rome, pour lui faire part de l'abjection du trafic d'humains en Afrique. Voyage ambitieux dans une époque pleine de dangers, sur des océans qui convoient par navires entiers de la marchandise humaine. Le héros va en effet voyager sur un navire négrier, et découvrir le triangle de la mort de la traite esclavagiste. Du Kongo à l'Amérique, celui qui est rebaptisé Dom Antonio depuis son baptême chrétien, assiste à des scènes d'une cruauté insupportable envers ses frères capturés sur leurs terres pour être vendus dans les plantations. Une traversée immonde, dans lequel aucune vie n'est sacrée, aucune mort n'est pleurée, si ce n'est pour le manque-à-gagner qu'elle représente pour l'armateur. En Espagne, Dom Antonio se voit confronté aux sidérantes torture de l'Inquisition catholique, une pratique religieuse à l'opposé de sa foi, qui va obliger cet homme, prêtre à la peau noire, à se cacher de la folie humaine. En arrivant à Rome, épuisé et désabusé, il aura peut-être l'occasion de rencontrer le pape.

    On pense au Candide de Voltaire en lisant ce roman de Wilfried N'Sondé, au verbe simple et au propos déchirant, basé sur un personnage historique avéré (On peut encore aujourd'hui voir la statue de Nsaku Ne Vunda à Rome). Un regard posé sur une époque où le concours des abominations semble sans borne, mais encore plus sur la capacité de l'homme à ignorer l'humanité de ses semblables.

    Un océan, deux mers, trois continents, Wilfried N'Sondé (France).

    Actes Sud. 268 pages. 20 €

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  • La tresse, Laetitia Colombani

    femmes, combats

    Elles sont trois. A plusieurs fuseaux horaires de distance, trois femmes se battent pour elles et pour leurs proches. L'une, en Inde, veut scolariser sa fille pour enfin sortir du système des castes qui condamne sa famille, intouchable, à ramasser les excréments des autres. La deuxième en Sicile, va devoir reprendre l'entreprise familiale de perruques artisanales au moment le plus critique. Une troisième au Québec, avocate et femme d'influence, découvre en apprenant qu'elle est atteinte d'un cancer l'envers du décor dans lequel elle jouait jusqu'alors son rôle à la perfection. Les trois femmes sont reliées, mais elles l'ignorent, car le tout ne tient qu'à un cheveu. 

    Voilà une manière originale de percevoir la mondialisation que ce roman. Un monde connecté qui fait inconsciemment émerger une certaine convergence des luttes : celle des femmes pour bénéficier de la place qu'elles méritent dans un monde sans merci. La tresse est un roman de combats, auréolé de beaucoup de délicatesse.

    La tresse, Laetitia Colombani (France).

    Le livre de poche. 238 pages. 7, 20 €

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