Amateurs d'histoires familiales sur fond historique, ce roman est pour vous. Le contexte ? Le Cuba d'avant les frères Castro, quand les Américains régnaient en maîtres sur une terre fertile pour faire pousser les fruits, où la main d'oeuvre elle aussi se trouvait à foison, sur place ou en provenance d'Haïti. Des Américains businessmen à l'envi, qui sous couvert de développement économique imposaient leurs propres règles du jeu : un droit du travail "maison", des règles arbitraires.
La famille Stites vit ainsi à Cuba. Luxueusement, voluptueusement, puisque le père est le dirigeant de la société "United fruits". Mais pas si tranquillement quand même. Del, le fils aîné, disparaît un jour pour combattre aux côtés des rebelles. Vraie conviction ou révolte à court terme, l'affront est vif et douloureux pour la famille. Et puis il y a cette micro-société américaine qui se recrée sous les tropiques, digne d'une organisation de castes. Petits drames pour tromper l'ennui et observations médisantes jalonnent le quotidien des femmes. Mais il fait beau, mais on est riches. Alors on reste.
Il y a les autres aussi, ceux qui débarquent à Cuba parce qu'ils ont des choses à faire oublier, aux Etats-Unis, en Europe. Comme si les alcools forts sous les tropiques pouvaient réellement favoriser l'amnésie. Quelques mercenaires comptent parmi eux, bien intégrés dans la société, sirotant des cocktails comme les autres dans les soirées du Club. Leur fiabilité en temps de crise sera peut-être limitée...
Le pouvoir des rebelles menés par les frères Castro finit par grandir. Le jour où les plantations de canne à sucre sont incendiées, les hommes d'affaire américains enlevés, les avions de Batista commencent à survoler pesamment le ciel de Nicaro. La menace est partout. Alors on pressent l'exil, même si ce roman de Rachel Kushner ne l'évoque jamais explicitement.
Télex de Cuba, Rachel Kushner (USA). Points. 477 pages. 8 €.
Ce roman fait partie de la sélection du Prix du meilleur roman des éditions Points.