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histoire familiale

  • Télex de Cuba, Rachel Kushner

    002528983.jpgAmateurs d'histoires familiales sur fond historique, ce roman est pour vous. Le contexte ? Le Cuba d'avant les frères Castro, quand les Américains régnaient en maîtres sur une terre fertile pour faire pousser les fruits, où la main d'oeuvre elle aussi se trouvait à foison, sur place ou en provenance d'Haïti. Des Américains businessmen à l'envi, qui sous couvert de développement économique imposaient leurs propres règles du jeu : un droit du travail "maison", des règles arbitraires. 

    La famille Stites vit ainsi à Cuba. Luxueusement, voluptueusement, puisque le père est le dirigeant de la société "United fruits". Mais pas si tranquillement quand même. Del, le fils aîné, disparaît un jour pour combattre aux côtés des rebelles. Vraie conviction ou révolte à court terme, l'affront est vif et douloureux pour la famille. Et puis il y a cette micro-société américaine qui se recrée sous les tropiques, digne d'une organisation de castes. Petits drames pour tromper l'ennui et observations médisantes jalonnent le quotidien des femmes. Mais il fait beau, mais on est riches. Alors on reste. 

    Il y a les autres aussi, ceux qui débarquent à Cuba parce qu'ils ont des choses à faire oublier, aux Etats-Unis, en Europe. Comme si les alcools forts sous les tropiques pouvaient réellement favoriser l'amnésie. Quelques mercenaires comptent parmi eux, bien intégrés dans la société, sirotant des cocktails comme les autres dans les soirées du Club. Leur fiabilité en temps de crise sera peut-être limitée...

    Le pouvoir des rebelles menés par les frères Castro finit par grandir. Le jour où les plantations de canne à sucre sont incendiées, les hommes d'affaire américains enlevés, les avions de Batista commencent à survoler pesamment le ciel de Nicaro. La menace est partout. Alors on pressent l'exil, même si ce roman de Rachel Kushner ne l'évoque jamais explicitement.

    Télex de Cuba, Rachel Kushner (USA). Points. 477 pages. 8 €.

    Ce roman fait partie de la sélection du Prix du meilleur roman des éditions Points.

     

    Catégories : Littérature Américaine 0 commentaire
  • Quand la lumière décline, Eugen Ruge

    allemagne,communisme,histoire familialeL'action démarre à Berlin, en 2001. Même si une décennie sépare les berlinois de la chute du Mur, l'Histoire est encore fraîche. Pour Alexander notamment, dont l'arbre généalogique symbolise à lui seul les complexités du destin de la RDA. Ses grands-parents ont en leur temps cru dur comme fer à l'idéal communiste, et ont dû payer le prix de leur engagement en s'exilant à Mexico. Plus tard, son père ira tester les goulags staliniens. Se mariera à Irina, dont la mère russe Nadejda Ivanovna partagera toujours l'existence. L'internationale communiste réunie dans une même famille en quelque sorte. Avec ses grands espoirs et ses désenchantements cruels.

    Quand la lumière décline sent le béton et la mélancolie, la recherche de sens, le questionnement. La complexité des rapports humains s'y mélange avec celle des grands événements, des valeurs en évolution. A découvrir.

    Quand la lumière décline, Eugen Ruge (Allemagne). 10/18. 448 pages.

    8, 80 €.

    Catégories : Littérature Allemande 0 commentaire
  • Eux sur la photo, Hélène Gestern

    lettres,histoire familiale,secretsComment faire parler une image, un cliché en noir et blanc, témoin muet d'une époque ? Hélène n'en a pas la moindre idée, alors elle tente : après avoir trouvé un cliché représentant sa mère dont elle ne sait rien, elle agit comme quelqu'un qui n'a rien à perdre. Elle publie une annonce dans Libération, pas pour retrouver la trace d'un inconnu croisé dans le métro, mais pour trouver des réponses que plus personne autour d'elle ne peut lui donner. Avec cette photo, qui date de près de 40 ans, une coupure de presse, des noms, un lieu. Un faisceau d'indices faible. 

    Mais plus d'un mois après avoir publié l'annonce, un courrier va lui parvenir. Le croisement des données évoque quelque chose à Stéphane. Ensemble, ils vont lier une relation épistolaire et mener leur enquête. Car Hélène n'est pas la seule à ignorer une partie de son histoire, et elle va trouver en Stéphane un allié, un complice, un informateur, un ami...

    Tous les deux, ils avancent à petits pas. Sur le mode désuet de la communication par lettres, même s'ils concèdent parfois quelques mails et SMS, ils prennent le temps, comme avant. Comme à l'époque des mystères familiaux qu'ils souhaiteraient lever. Au prix de découvertes qui peuvent changer le cours de leur vie.

    Hélène Gestern parvient à maintenir un suspens étonnant, car la lenteur de la communication pourrait exacerber l'impatience du lecteur. Au contraire, on rentre lentement et vraiment dans cette histoire, pensant tenir les réponses quand elles s'échappent à nouveau. Avec l'impérieux besoin de savoir qui ils sont, eux, sur la photo.

    Eux sur la photo, Hélène Gestern (France). Arlea poche. 300 pages. 10 €

    Catégories : Littérature Française 0 commentaire
  • Les oreilles de Buster, Maria Ernestam

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    Pour ses cinquante-six ans, Eva a reçu un cadeau gentil, joli, attentionné, de la part de sa petite fille : un carnet pour tenir son journal intime. Drôle d'idée se dit-elle. Et puis petit à petit, comme si les pages vierges l'appelaient, elle va griffonner quelques mots. Jusqu'au moment où ce carnet, devenu réceptacle de secrets trop bien gardés, va manquer de pages devant la nécessité de la confession. Car Eva le dit dès les premières lignes : à 7 ans, elle a décidé de tuer sa mère. A 17, elle est passée à l'acte. Et à part le singulier Buster, jusqu'à ce fameux carnet, elle n'a eu personne à qui raconter son étrange destinée. Même Sven, l'homme aux contours un peu mystérieux qui partage sa vie, n'est au courant de rien...

    On n'est donc pas ici du tout dans le polar ou le thriller. Car le propos d'Eva, avec quarante ans de recul, c'est de poser un contexte, d'expliquer le processus. Eva est une femme ouverte, serviable, à l'écoute de ses proches, de ses voisins. Elle fut une enfant attachante. Elle n'a rien d'un monstre. Mais une connexion ne s'est pas faite entre sa mère, humiliante, égoïste et fantasque, et elle. Puis les événements s'enchaînent. Sans surprise pour nous, lecteurs, tenus d'emblée au courant du drame central. Mais dans la tension, l'attente du point de non-retour, dans le comportement de la mère tout autant que dans le geste de la fille.

    Les oreilles de Buster, Maria Ernestam (Suède). Actes Sud. 448 pages.

    9, 80 €

    Vous aimerez peut-être aussi : La tour d'arsenic, de Ann B. Radge ou Rien ne s'oppose à la nuit, de Delphine de Vigan

     

    Catégories : Livre 2 commentaires
  • Les vaches de Staline, Sofi Oksanen

    51KgwkbHdEL._.jpgVu d'Europe de l'ouest, un jour le mur de Berlin est tombé, et avec lui le rideau de fer et toute une époque. La narratrice de ce roman - comme Sofi Oksanen du reste- est Finlandaise, de mère Estonienne. Les Estoniens du début du 20 ème siècle ont dû devenir des soviétiques. Sans être des Russes, avec lesquels ils ne partagent pas grand chose. Vu de Finlande, le pays riche et puissant de l'autre coté du golfe, les Estoniennes sont les femmes qui cherchent à se marier avec un homme de l'ouest, ou simplement à faire une passe pour une paire de collants ou des tampons hygiéniques. Le rapport de force est injuste forcément. La perception de l'autre, de l'étranger pourtant si proche, est déformée, faussée.

    Oppressés entre les sirènes de l'ouest et la pesanteur soviétique, déportés en Sibérie où l'horreur est partout, les Estoniens se noient, semblent disparaître.

    Anna, née dans les années 80, la narratrice, vit avec ces deux cultures, Finlandaise et Estonienne. Mais partant, également avec la honte, des deux côtés. Il lui est impossible de révéler ses origines d'Eesti en Finlande, tant les clichés ont la peau dure, et tant le KGB a des oreilles partout, ici aussi, incarné par des petits soldats à la solde de ce pouvoir qui tient en étau, de l'autre côté de l'eau, leurs familles restées au pays. En Estonie, compliqué d'avouer qu'elle ne vit pas dans un conte de fées en Finlande quand les apparences montrent le contraire.

    Les chapitres se succèdent, alternant entre l'histoire de la famille d'Anna depuis l'arrivée des Soviétiques et le calvaire moderne de la jeune fille : l'incapacité à se nourrir normalement. Car ce que mange Anna, elle le vomit aussitôt. Et elle mange, beaucoup. Passant maître incontestée dans l'art de la dissimulation, du silence, de la disparition. Vomissant une Histoire qu'elle ne parvient pas à digérer.

    Ce roman incarne majestueusement un pan énorme du destin Estonien, et plus largement la souffrance de ceux qui ont dû quitter leur terre, et qui ne parviennent pas à reconstituer le puzzle. Un roman pur et très puissant.

     Les vaches de Staline, Sofi Oksanen (Finlande). Le livre de poche. 552 p.

    7, 90 €

     

    Catégories : Littérature Scandinave 0 commentaire
  • A défaut d'Amérique, Carole Zalberg

    histoire familiale,juif,usa,guerreQue voyons-nous à part quelques pelletées de terre quand nous enterrons nos grands-parents, nos arrières grands-parents ? De vieilles personnes, fatiguées, usées, apaisées qui ont enfin trouvé le repos. Difficile de les imaginer jeunes, amoureux, fougueux. Difficile même de les imaginer dans le tourbillon de l'Histoire : tranchées, déportation, immigration, pogroms, Algérie. Fantômes aux yeux hagards dans le hall de l'hôtel Lutetia.

    Puisque les grands traumatismes de l'Histoire donnent naissance à des silences sans fin, nous ne parvenons pas à imaginer nos vieux dans leurs jeunes années. A défaut d'Amérique est un roman qui débute justement par un enterrement, celui d'Adèle. Une très vieille femme donc. Juive. Qui aura retrouvé quelques années avant sa mort Stanley, le soldat américain rencontré dans les rues de Paris à la Libération. Et à cet enterrement, une présence étrange, celle de Suzan, la fille de l'Américain.

    Alors on reprend tout depuis le début, l'histoire de l'Europe depuis les premiers jours du XXème siècle. Tous ces événements dont on connaît les noms en oubliant parfois de les incarner, de leur donner des visages. Se dessine ainsi l'histoire de deux familles, chacune d'un côté de l'Atlantique, chacune résumant un siècle fou. 

    Carole Zalberg nous prend avec elle, de Vilnius à la rue de Beaubourg, de Palm Beach à l'Afrique du sud, des pogroms aux tours jumelles. Avec ces femmes et leurs familles, acteurs et victimes d'un siècle qui donne le tournis. L'Histoire prend grâce à elle des visages attachants et on peine à abandonner A défaut d'Amérique.

    A défaut d'Amérique, Carole Zalberg (France). Babel. 240 pages. 7, 70 €

    Ecrire sur plus d'un siècle d'Histoire : un projet titanesque ? Retrouvez les réponses de Carole Zalberg dans l'entretien qu'elle a accordé à Fais-moi les poches !

    Catégories : Livre 0 commentaire
  • Carole Zalberg : "Mon outil est avant tout l'empathie"


    empathie,écriture,histoire familiale

    En écrivant A défaut d'Amérique, Carole Zalberg a entrepris un projet de grande envergure : un roman qui court sur plus d'un siècle, dans les remous et les cataclysmes de l'Histoire du XXème siècle. Dans ces turbulences, des êtres humains, des familles, des relations naissent et meurent. Sous la plume de Carole Zalberg, les événements prennent corps, les acteurs de l'Histoire ont un visage.


    Fais-moi les poches ! - Ecrire un roman qui se déroule sur plus d'un siècle, c'est un peu titanesque, ça ne fait pas un peu peur ? De quoi se nourrit cette écriture : témoignages, travail de recherche ?

    Carole Zalberg - Non, je n’ai pas été impressionnée pour la simple raison que je n’avais pas pour projet de couvrir le vingtième siècle. Comme toujours, je suis partie de quelques données et envies (la rencontre entre Adèle et Stanley, le voyage d’Adèle outre-atlantique un demi-siècle plus tard, l’envie d’explorer les effets des mouvements provoqués par les conflits, etc) et j’ai tiré sur le fil. Tout s’est imposé au fur et à mesure, y compris la construction. Bien sûr, j’ai fait quelques recherches. Juste assez pour ne pas commettre d’erreurs grossières mais pas trop : je n’aime pas que la documentation prenne le pas sur l’invention.


    FMLP - D'après vous, les traumatismes liés à l'Histoire peuvent-ils se résorber ou condamnent-ils irrémédiablement des familles ou des individus au malheur, même à travers les générations, comme peut le laisser penser le roman ?

    C. Z - Je n’ai pas de théories à ce sujet et, là encore, je me contente, de façon purement intuitive, d’imaginer des personnages et leur évolution. Mon “outil” est avant tout l’empathie. Ce que j’ai imaginé pour cette lignée de femmes, à mesure que je creusais, c’est un “mal” enkysté, ce sont des peurs métabolisées, transformées, que seul le temps - la vie qui s’écoule - permet d’évacuer.


    FMLP - Quel "rôle" joue exactement Suzan dans le scénario de votre roman ? Observatrice, rabat-joie, rattrapeuse de temps perdu... ?

    C. Z - Je crois que Suzan est tout cela à la fois. Elle rêve d’offrir à son père un dernier bonheur, est dépassée par ce qu’elle provoque et confrontée à ses propres limites et renoncements.


    FMLP - Et en ce moment, vous écrivez ?

    C. Z - Je suis davantage dans une phase de réécriture et de “mijotage” que d’écriture à proprement parler. J’ai retravaillé, pour le festival Livres à vous de Voiron, un roman inédit, “Entre autres” que les éditions Jérôme Millon publieront en tirage limité (c’est-à-dire confidentiel), relu les épreuves de Feu pour feu, mon roman à paraître en janvier chez Actes Sud, et je couve un prochain projet dont je ne peux encore parler mais qui me porte déjà alors même que je n’en ai pas écrit une ligne.


    Carole Zalberg est aussi l'auteure, entre autres, de La mère horizontale ; Et qu'on m'emporte, Albin Michel. Et en littérature jeunesse : Le jour où Lania est partie, Nathan ; Je suis un arbre, Actes Sud junior ; J'aime pas dire bonjour, Grasset jeunesse.
    Catégories : Livre, Rencontres 0 commentaire