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adolescence

  • Des poings dans le ventre, Benjamin Desmares

     

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    Il erre dans les rues, en mode guetteur. A l'affût de la moindre castagne, il se drogue à l'envie de frapper, de faire peur. Toujours sur le qui-vive, que ce soit pour trouver ses victimes ou pour échapper à la vigilance de sa mère, s'échapper de l'appartement quand elle l'attend dans la cuisine avec l'espoir toujours vain de communiquer. Sur la volonté, la maîtrise de la situation, en toutes circonstances. Pour lui, frapper, c'est vivre. Tenir debout. Etre le plus fort. Dominer de toutes ses forces l'envie d'être aimé à un âge, l'adolescence, où cette aspiration dépasse souvent toutes les autres.

    On est dans sa peau, à ce narrateur. Surtout qu'il nous embarque, s'adresse à nous en se parlant à lui. Evite le « je », comme pour esquiver toute possibilité d'introspection, d'explication de la violence gratuite. Peut-être aussi pour observer, de loin, le personnage terrible qu'il incarne.

    Roman noir en mouvement perpétuel à travers les rues d'une adolescence tourmentée, Des poings dans le ventre, de Benjamin Desmares, s'inscrit aussi dans la lignée du roman initiatique, dans lesquels les rencontres ne sont pas plus fortuites que sans conséquence. Une lecture rapide, qui coupe le souffle, comme le ferait un poing dans le ventre.

    Des poings dans le ventre, Benjamin Desmares.

    Edition du Rouergue. 78 pages. 8, 70 €

    A découvrir aussi, du même auteur : Cornichon Jim, Une histoire de sable.

     

    Catégories : Littérature Française, Littérature jeunesse, Roman noir 0 commentaire
  • Les séparées, Kéthévane Davrichewy

    amitié,amour,coma,adolescence, vie adulteLa famille, les amours, l'amitié. Ainsi se résume la trilogie affective des vies humaines. Pour Alice et Cécile, les deux femmes qui occupent la première place dans ce roman, les amours auront été, au cours des longues années de leurs existences, fluctuantes, tandis que les rôles de leurs familles et de leur amitié auront traversé sans broncher -ou presque- les changements sociétaux, politiques, ou culturels de leur pays, la France. De mai 1981 aux smartphones, les amies grandissent, mûrissent, vieillissent ensemble, se désillusionnent et s'enthousiasment au gré des événements. Se serrent les coudes. Et puis un jour -gâchis- s'éloignent.

    Quand Cécile se retrouve emmurée dans une chambre d'hôpital suite à un accident de voiture, y aura-t-il quelqu'un pour penser à prévenir Alice, après toutes ces années ? Y aurait-il eu entre elles des omissions ou des mensonges plus graves que d'autres ?

    Kéthévane Davrichewy propose au lecteur une place atypique, car la narration l'amène tour à tour dans les pensées comateuses de Cécile et dans la chronologie de l'amitié entre les deux femmes. On peut s'y perdre un peu au cours des premières pages, pour se retrouver fasciné par la complexité -et l'évidence, à rebours- du dénouement.

    Les séparées, Kéthévane Davrichewy (France). 10/18. 163 pages. 6, 60 €

    Catégories : Livre 5 commentaires
  • La petite cloche au son grêle, Paul Vacca

    adolescence,proust,lecture,maladie,mort,insoucianceRécit d'enfance, d'adolescence. Roman de la candeur, de la légèreté. De l'insouciance et du drame. Le narrateur replonge dans ses tendres années et se voit confronté à la nécessité de les raconter, en entendant sonner une petite cloche, sa petite madeleine de Proust à lui, et ce n'est pas rien de le dire. L'école n'est pas dans ses sujets de priorité, surtout avec une prof de français pareille, toujours prête à humilier sa prose devant toute la classe. Ce qui a le don de mettre hors d'eux des parents -une mère surtout- fiers de leur progéniture. Fiers et surtout confiants, bienveillants, aimants, solides. Il y a les filles, les billets doux qui finiront par s'écrire, pour finalement tomber de la poche de l'entremetteur pourtant de bonne volonté. Il y a le café des parents, où l'arrivée inopinée d'un roman classique va bouleverser le quotidien. Les copains, les escapades en vélo, le nom des fleurs, Pierre Arditi. Il y a tout ça. 

    Et puis cette mère qui prend le train. Une fois, puis une autre, pour des raisons qui ne sont que des prétextes, des motifs imaginaires voués à préserver l'innocence de cet enfant plein de vie. Ses retours, amaigrie. Ce père qui se plie en quatre pour inviter le rêve dans le quotidien.

    Les mots sont doux, simples, fleurent la nostalgie et les grandes vacances au grand air. Une tendresse infinie surgit de ce roman, prenante. Le récit d'une enfance réussie, mais marquée d'un chagrin tellement inénarrable qu'il ne sera qu'effleuré, induit sous la pudeur et la délicatesse. 

    La petite cloche au son grêle, Paul Vacca (France). Le livre de poche.

    162 pages. 6,10 €.

    La petite cloche au son grêle, une  autobiographie ? Pour le découvrir, lisez l'entretien avec Paul Vacca

    Si vous avez aimé ce roman, vous apprécierez peut-être Fruits et légumes, d'Anthony Palou.

    Catégories : Livre 4 commentaires
  • Paul Vacca : "La lecture, un acte charnel et fédérateur"

    385671_235819876544592_468334448_n.jpgDans La petite cloche au son grêle, Paul Vacca fait adhérer le lecteur, à son insu, à un pacte autobiographique. Pourtant, les apparences peuvent se révéler trompeuses. C'est ce que nous explique l'auteur, avec la fraîcheur que l'on retrouve dans son roman. Merci à lui pour ces révélations surprenantes sur ses "secrets de fabrication".

    Fais-moi les poches - Pour commencer, quelle est la part d'autobiographie dans ce roman ?

    Paul Vacca - Je serais tenté de dire "rien" puisque toute cette histoire est une pure fiction. Je n'ai pas vécu dans le Nord, ni dans un bar, je n'ai pas lu Proust à 13 ans etc. Je n'avais pas à travers ce roman l'envie de me raconter, ni de faire de mon expérience et de ma vie un matériau fictionnel. Pour autant, il se glisse toujours qu'on le veuille ou non d'ailleurs -une part d'autobiographie... Mais elle reste difficile à évaluer. Où se situe-t-elle ? Je ne saurais le dire. Si, j'avoue, j'ai quand même cédé une petite concession autobiographique : j'ai bien eu une prof de Français qui s'appelait Mlle Jeannin qui m'a fait subir les mêmes supplices en classe qu'au narrateur !

    FMLP - Pourquoi avoir choisi le style autobiographique, avec une telle vraisemblance dans les descriptions et les ressentis, pour écrire ce roman ?

    P.V - Je ne sais pas si ce sont les decriptions ou les ressentis qui créent cet effet. Je serais tenté de dire que c'est plutôt par le "pacte autobiographique" que je passe avec le lecteur en parlant à la première personne. Cela induit fatalement un certain type de relation au récit. Je voulais jouer de cet effet d'optique pour créer un effet de réel... Le paradoxe romanesque : tromper le lecteur pour qu'il soit en confiance. Je recherchais plus de proximité pour cette histoire. C'est d'ailleurs un des ressorts de toute fiction... C'est aussi un autre clin d'oeil à Marcel Proust. La Recherche du Temps perdu est écrite à la première personne sur un pacte autobiographique... Mais Proust en a fait une oeuvre romanesque à part entière évidemment. Il y a bien sûr le terreau vécu mais c'est la transformation, l'alchimie proustienne qui importe, sa vision... Et jamais le narrateur ne donne son nom bien que souvent on entend parler de "Marcel" le concernant. Toutes proportions gardées, j'ai subi la même méprise sur le nom du narrateur : à plusieurs reprises des lecteurs ont évoqué un certain Paolo alors que nul prénom n'apparaît jamais.

    FMLP - Pourquoi avoir choisi la deuxième personne du singulier pour évoquer la mère du narrateur ?

    P. V - C'est un choix qui s'est imposé à moi en cours d'écriture. J'ai commencé le livre à la troisième personne, puis à la première personne uniquement... Mais une fois le premier jet rédigé, j'ai senti que quelque chose cochait - si je peux me permettre le jeu de mots. Cette histoire pour être portée jusqu'au bout devait contenir une adresse du narrateur à sa mère. D'où l'idée du "tu" qui a germé. Je voulais que le lecteur se retrouve plongé dans une confidence entre un fils et sa mère ; sauf qu'il s'agit du livre que le lecteur est en train de parcourir. Ainsi le lecteur tient dans ses mains le fruit de la promesse de l'enfant, le livre qu'il a promis à sa mère. Je voulais que le lecteur puisse ressentir une forme de libération à la fin du roman. En lisant le livre, il a vécu -et participé !- aux retrouvailles du fils et de sa mère.

    FMLP - La lecture, la famille, l'amitié : des remèdes simples contre les agressions extérieures ?

    P. V - Remèdes simples, je ne sais pas... J'ai souhaité montrer en tous cas que la lecture, loin d'être un acte passif et solitaire, constitue un acte charnel et fédérateur. Une lectrice perspicace m'a d'ailleurs fait remarquer que le livre trouvé par le narrateur dans le roman -Du côté de chez Swann- jouait le rôle de fée dans cette histoire qu'elle qualifiait de conte... En effet, il fédère et unit la famille dans une certaine mesure lui jette un sortilège de bonheur ou d'antidote au malheur. Les livres ont ce pouvoir. C'est d'ailleurs ce que vous prouvez quotidiennement dans vos blogs littéraires : la lecture comme puissant objet de partage et d'échanges qui permet de transcender les vicissitudes quotidiennes. Alors toutes mes félicitations pour ce que vous faites ! Et un message : continuez !

    Catégories : Livre, Rencontres 2 commentaires
  • Dade City, Laurent Sagalovitsch

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    A Dade City, (quelle qu'en soit la localisation exacte), comme partout ailleurs, les adolescents se révoltent contre leurs parents, les détestent, fuguent parfois. Mais celui qui narre l'histoire a une très solide raison de le faire : il a assisté à une scène criminelle, dont son père était l'auteur. Un père ordinairement assez dur et austère, qui élève son fils dans la rigueur judaïque, qui va tout à coup commettre l'irréparable dans cette paisible bourgade où tout semble réglé comme du papier à musique. Enfin ça, l'image d'une contrée lisse, c'est ce qu'on peut penser jusqu'à l'arrivée d'un autre narrateur, nouveau venu dans la cité, qui va déceler des coulisses intriguantes à Dade City. Et même trouver un amour qui restera platonique et idéalisé auprès d'une femme mariée à un notable. Un chien dans un jeu de quilles, dont la candeur et l'ignorance des règles du jeu à Dade City vont bousculer catégoriquement le quotidien.

    Et c'est là que tout basculera. Des malentendus, des scènes sur-interprétées dans le terreau fertile de l'aigreur relationnelle, une culpabilité religieuse intense et entretenue vont faire s'emballer un scénario qui n'aurait pas dû se révéler aussi dramatique.

    L'écriture de Laurent Sagalovitsch ménage une tension narrative évidente et construit au fil des pages un cheminement vers l'étonnement et l'incrédulité. Car l'acte incroyable et irrémédiable a été commis, et il n'est définitivement pas celui que l'on pense.

    Dade City, Laurent Sagalovitsch (France / Canada). Babel. 144 pages. 7 €.

    Catégories : Livre 1 commentaire
  • Méfiez-vous des enfants sages, Cécile Coulon

    515TWpviE4L._SL500_.jpgVoilà un ouvrage que l'on repose le souffle un peu coupé. C'est court, dense, rock'n roll. Et puis si on n'y prend garde, on se dit simplement qu'on vient de lire un très bon roman américain. Et bien non, ce roman est écrit par une jeune Française, Cécile Coulon. Par on ne sait quel tour de passe-passe, toutes nos références culturelles sont transposées outre-atlantique, contrée où l'on sirote du "Coke" à longueur de journée, accroupi sur les marches de sa maison, que l'on suppose en bois et bordée de voisines.

    Où l'on fait la connaissance de Lua, une adolescente qui va cesser, un jour, de croire en Dieu. De sa mère, qui a cessé, un jour, de croire en ses rêves pour rentrer dans la norme des classes moyennes américaines, malgré une parenthèse enchantée à San Francisco. De son père, plus soucieux des bestioles en tous genres que d'assumer un rôle de chef de famille. D'Eddy, le voisin un peu crade, fan d'Alice Cooper, qui fait un peu tache dans le décor propret.

    Tout change autour de Lua, la voilà confrontée à ses premières désillusions. Mais on ne s'inquiète pas trop pour elle, elle semble avoir la carrure nécessaire. 

    Dans un style rythmé, très incisif, poétique et un rien désabusé, Cécile Coulon semble avoir écrit ce roman comme on pique un sprint. Une découverte surprenante à bien des égards.

    Méfiez-vous des enfants sages, Cécile Coulon (France). Points. 108 pages.

    5, 20 €

    Catégories : Livre 2 commentaires
  • L'ardoise magique, Valérie Tong Cuong

    51Wdkq1kqML._SL500_AA300_.jpgEcrire un roman qui débute par un suicide relève de la gageure. Comment continuer l'histoire, ne pas faire fuir le lecteur, ne pas céder à la facilité des clichés ? Valérie Tong Cuong nous invite à suivre le chemin de Mina, dix-huit ans, seule au monde et désespérée. Celle à qui on ne parle pas, celle qui ne parle pas. A ses côtés, heureusement, il y a Alice, son contraire exact : jolie, intelligente, issue d'une famille aisée. Mais malgré les apparences, et même si c'est incompréhensible pour Mina, Alice ne veut plus vivre. Alors elle va le faire, comme prévu, elle va sauter sur les rails du chemin de fer. Aucune chance d'en réchapper. Mina, elle, ne pourra pas passer à l'acte. Elle va devoir vivre avec la culpabilité et la détresse, répondre à des questions sur la vie qu'elle ne s'était pas encore posées. Et puis il y aura Sans-Larme, le jeune gothique vêtu de noir. Grâce à lui, Mina va pouvoir enfin s'ouvrir.

    Valérie Tong Cuong plonge avec une grande sensibilité dans les méandres de l'isolement et de l'adolescence. Elle nous emmène avec Mina dans une enquête désarçonnante sur la vie d'Alice, la pauvre petite fille riche qui a préféré la mort. Une disparition que Mina aura tardivement toutes les clés pour comprendre et qui lui en apprendra beaucoup plus qu'elle ne le pensait sur elle-même.

    Un roman sur la solitude extrême et sur les facultés de l'être humain à -peut-être- reprendre le dessus.

    L'ardoise magique, Valérie Tong Cuong (France). J'ai lu. 157 pages. 6, 20 €.

    Catégories : Livre 3 commentaires