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Livre - Page 4

  • Comment devenir écrivain quand on vient de la grande plouquerie internationale, Caryl Férey

    51oPANJZCML._.jpgBon, soyons clairs, le titre est à l'image du texte : insolent, drôle, au style enlevé. En un mot : décapant. Le parcours autobiographique d'un écrivain, pour qui tout commence par les journées d'enfance pas toujours roses aux côtés d'un frère, comment dire... un peu rude.  En province. Non pas en province, en Bretagne. Non, pas en Bretagne, à Montfort-sur-Meu !

    Puis c'est l'appel du stylo très tôt, des textes-fleuves d'écolier, raillés par la maîtresse (encore !). Quelques années et une réforme du service militaire plus tard, le premier roman est publié grâce à la souscription, bien avant les facilités du monde numérique. Quelques squats chez des copains après, pour échapper au RMI, les couloirs de la télévision. Où oeuvrent les tâcherons du spectacle, les ouvriers du rêve, payés (pas souvent) à coups de gloire passagère plutôt qu'en fraîche monnaie pour pondre des scénarios de série (où l'on découvre qu'"écrire de la merde, ce n'est pas si facile que ça"). Le parcours est long, tortueux, décourageant. Mais l'envie d'écrire, et par dessus tout, de se faire lire et de pouvoir en vivre surpasse tout, catapulte les épreuves. Surtout quand on a toujours été chanceux, qu'on a toujours fait 6 aux dés dans les jeux de société.

    Alors un jour, oui, pour Caryl Férey, c'est arrivé, après quelques sciatiques et un CV contenant à lui tout seul tous les corps de métier du monde du travail : être publié dans une grande maison d'édition. Enfin. Il était temps.

    Dès les premières lignes, Caryl Férey nous embarque dans son univers déjanté. Il décrit la galère avec un humour vif et un style évident, singulier, comme si le contenu était complètement à l'image des mots qui le décrivent. Décoiffant !

    Comment devenir écrivain quand on vient de la grande plouquerie internationale,

    Caryl Férey (France). Points. 161 pages. 10 €

    De la plouquerie internationale aux marches de Cannes : pour en savoir plus sur Caryl Férey, lisez l'entretien qui suit.

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  • Caryl Férey : "Adepte du grand écart, tout est en place ! "

    écriture,cinéma,cannes,éditionCaryl Férey trempe habituellement sa plume dans l'encre noire du polar. Après Zulu (adapté au cinéma par Jérôme Salle et présenté cette année à Cannes !), Haka, Saga Maorie ou encore Mapuche, le voilà qui nous livre Comment devenir écrivain quand on vient de la grande plouquerie internationale. Un retour en humour sur le parcours du combattant de l'aspirant-écrivain.

    Fais-moi les poches ! - Alors Caryl Férey, vous êtes devenu héros ou persona non grata à Montfort-sur-Meu, promue capitale de la "plouquerie" grâce à vous ? Et dans les maisons d'édition ou boîtes de production télé que vous citez ?

    Caryl Férey - Je pense que les Montfortais auront saisi l'amicale dérision. Idem pour les maisons d'édition !

    FMLP - Dans votre roman, vous décrivez deux mondes sauvages : celui de l'enfance et de ses souffre-douleurs (vous, en l'occurrence) et celui de l'édition. Lequel est le pire selon vous ?

    C.F - En fait, ni l'un ni l'autre, ou les deux. Dans tous les cas, l'important est de suivre son chemin sans tenir compte des sens interdits.

    FMLP - La publication de votre premier roman grâce à la souscription de vos amis, des clients du bar dans lequel vous travailliez à Rennes, a lancé votre carrière à la fin des années 90. Une telle aventure serait-elle possible aujourd'hui, voire facilitée par la sphère numérique ?

    C.F - Oui, je pense que c'est même plus probable aujourd'hui avec internet et les projets qui vont avec - pour le meilleur et pour le pire.

    FMLP - L'adaptation de votre roman Zulu a été présentée hors-compétition à Cannes cette année ! Alors, Caryl Férey, vous en êtes où avec la plouquerie ?

    C. F - L'ironie du sort a voulu que "la plouquerie" sorte la même semaine à Cannes : adepte du grand écart, tout est en place.

    FMLP - Qu'écrivez-vous en ce moment ?

    C. F - J'écris mon prochain gros roman, qui se déroulera au Chili. Beaucoup de frustrations - pour le moment c'est nul.

    Caryl Férey est aussi l'auteur de Mapuche (Série noire Gallimard), Saga Maorie, ZuluHaka, La jambe gauche de Joe Stummer, Utu, D'amour et de dope fraîche (Le Poulpe) (Folio policier), Petit éloge de l'excès (Folio), Raclée de verts (Pocket)...

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  • Le contenu du silence, Lucia Etxebarria

    canaries,secte,nazisPolar ? Enquête historique ? Essai sur les méthodes sectaires ? Saga familiale ? Il y a un peu de tous ces ingrédients dans ce nouvel opus de Lucia Etxebarria. Tout débute, une fois n'est pas coutume, à Londres. Un homme est contacté par une amie de sa soeur, dont il est sans nouvelle depuis dix ans. Elle a disparu, elle grenouillait dans un mouvement sectaire. Ses membres viennent de se sacrifier lors d'un suicide collectif. Direction les îles Canaries pour essayer de résoudre l'énigme de cette disparition pour le moins inquiétante.

    Mais éclairer les motivations d'un proche qui n'en est plus un n'est pas si simple. Surtout quand on a un mariage sur le feu, qu'on se retrouve propulsé dans une île où rôdent les mysticismes les plus variés, qu'on doit, pour comprendre, retracer le passé de sa famille, qu'on tombe sous le charme de l'ex-meilleure amie de la disparue, et que l'Histoire s'en mêle. Celle avec un grand H. La moche, la terrible. Celle de l'idéologie nazie.

    Comprendre le cheminement de Cordelia, pour son frère, ne se fera pas sans quelques questionnements intimes. Et c'est en homme différent, sans aucun doute, qu'il quittera les Canaries au terme de cette "enquête" palpitante.

    Le contenu du silence, Lucia Etxebarria (Espagne). 10/18. 384 pages. 8,40 €

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  • La petite cloche au son grêle, Paul Vacca

    adolescence,proust,lecture,maladie,mort,insoucianceRécit d'enfance, d'adolescence. Roman de la candeur, de la légèreté. De l'insouciance et du drame. Le narrateur replonge dans ses tendres années et se voit confronté à la nécessité de les raconter, en entendant sonner une petite cloche, sa petite madeleine de Proust à lui, et ce n'est pas rien de le dire. L'école n'est pas dans ses sujets de priorité, surtout avec une prof de français pareille, toujours prête à humilier sa prose devant toute la classe. Ce qui a le don de mettre hors d'eux des parents -une mère surtout- fiers de leur progéniture. Fiers et surtout confiants, bienveillants, aimants, solides. Il y a les filles, les billets doux qui finiront par s'écrire, pour finalement tomber de la poche de l'entremetteur pourtant de bonne volonté. Il y a le café des parents, où l'arrivée inopinée d'un roman classique va bouleverser le quotidien. Les copains, les escapades en vélo, le nom des fleurs, Pierre Arditi. Il y a tout ça. 

    Et puis cette mère qui prend le train. Une fois, puis une autre, pour des raisons qui ne sont que des prétextes, des motifs imaginaires voués à préserver l'innocence de cet enfant plein de vie. Ses retours, amaigrie. Ce père qui se plie en quatre pour inviter le rêve dans le quotidien.

    Les mots sont doux, simples, fleurent la nostalgie et les grandes vacances au grand air. Une tendresse infinie surgit de ce roman, prenante. Le récit d'une enfance réussie, mais marquée d'un chagrin tellement inénarrable qu'il ne sera qu'effleuré, induit sous la pudeur et la délicatesse. 

    La petite cloche au son grêle, Paul Vacca (France). Le livre de poche.

    162 pages. 6,10 €.

    La petite cloche au son grêle, une  autobiographie ? Pour le découvrir, lisez l'entretien avec Paul Vacca

    Si vous avez aimé ce roman, vous apprécierez peut-être Fruits et légumes, d'Anthony Palou.

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  • Paul Vacca : "La lecture, un acte charnel et fédérateur"

    385671_235819876544592_468334448_n.jpgDans La petite cloche au son grêle, Paul Vacca fait adhérer le lecteur, à son insu, à un pacte autobiographique. Pourtant, les apparences peuvent se révéler trompeuses. C'est ce que nous explique l'auteur, avec la fraîcheur que l'on retrouve dans son roman. Merci à lui pour ces révélations surprenantes sur ses "secrets de fabrication".

    Fais-moi les poches - Pour commencer, quelle est la part d'autobiographie dans ce roman ?

    Paul Vacca - Je serais tenté de dire "rien" puisque toute cette histoire est une pure fiction. Je n'ai pas vécu dans le Nord, ni dans un bar, je n'ai pas lu Proust à 13 ans etc. Je n'avais pas à travers ce roman l'envie de me raconter, ni de faire de mon expérience et de ma vie un matériau fictionnel. Pour autant, il se glisse toujours qu'on le veuille ou non d'ailleurs -une part d'autobiographie... Mais elle reste difficile à évaluer. Où se situe-t-elle ? Je ne saurais le dire. Si, j'avoue, j'ai quand même cédé une petite concession autobiographique : j'ai bien eu une prof de Français qui s'appelait Mlle Jeannin qui m'a fait subir les mêmes supplices en classe qu'au narrateur !

    FMLP - Pourquoi avoir choisi le style autobiographique, avec une telle vraisemblance dans les descriptions et les ressentis, pour écrire ce roman ?

    P.V - Je ne sais pas si ce sont les decriptions ou les ressentis qui créent cet effet. Je serais tenté de dire que c'est plutôt par le "pacte autobiographique" que je passe avec le lecteur en parlant à la première personne. Cela induit fatalement un certain type de relation au récit. Je voulais jouer de cet effet d'optique pour créer un effet de réel... Le paradoxe romanesque : tromper le lecteur pour qu'il soit en confiance. Je recherchais plus de proximité pour cette histoire. C'est d'ailleurs un des ressorts de toute fiction... C'est aussi un autre clin d'oeil à Marcel Proust. La Recherche du Temps perdu est écrite à la première personne sur un pacte autobiographique... Mais Proust en a fait une oeuvre romanesque à part entière évidemment. Il y a bien sûr le terreau vécu mais c'est la transformation, l'alchimie proustienne qui importe, sa vision... Et jamais le narrateur ne donne son nom bien que souvent on entend parler de "Marcel" le concernant. Toutes proportions gardées, j'ai subi la même méprise sur le nom du narrateur : à plusieurs reprises des lecteurs ont évoqué un certain Paolo alors que nul prénom n'apparaît jamais.

    FMLP - Pourquoi avoir choisi la deuxième personne du singulier pour évoquer la mère du narrateur ?

    P. V - C'est un choix qui s'est imposé à moi en cours d'écriture. J'ai commencé le livre à la troisième personne, puis à la première personne uniquement... Mais une fois le premier jet rédigé, j'ai senti que quelque chose cochait - si je peux me permettre le jeu de mots. Cette histoire pour être portée jusqu'au bout devait contenir une adresse du narrateur à sa mère. D'où l'idée du "tu" qui a germé. Je voulais que le lecteur se retrouve plongé dans une confidence entre un fils et sa mère ; sauf qu'il s'agit du livre que le lecteur est en train de parcourir. Ainsi le lecteur tient dans ses mains le fruit de la promesse de l'enfant, le livre qu'il a promis à sa mère. Je voulais que le lecteur puisse ressentir une forme de libération à la fin du roman. En lisant le livre, il a vécu -et participé !- aux retrouvailles du fils et de sa mère.

    FMLP - La lecture, la famille, l'amitié : des remèdes simples contre les agressions extérieures ?

    P. V - Remèdes simples, je ne sais pas... J'ai souhaité montrer en tous cas que la lecture, loin d'être un acte passif et solitaire, constitue un acte charnel et fédérateur. Une lectrice perspicace m'a d'ailleurs fait remarquer que le livre trouvé par le narrateur dans le roman -Du côté de chez Swann- jouait le rôle de fée dans cette histoire qu'elle qualifiait de conte... En effet, il fédère et unit la famille dans une certaine mesure lui jette un sortilège de bonheur ou d'antidote au malheur. Les livres ont ce pouvoir. C'est d'ailleurs ce que vous prouvez quotidiennement dans vos blogs littéraires : la lecture comme puissant objet de partage et d'échanges qui permet de transcender les vicissitudes quotidiennes. Alors toutes mes félicitations pour ce que vous faites ! Et un message : continuez !

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  • Les lisières, Olivier Adam

    9782290068489_cb.jpgLa sortie de ce roman en grand format ayant été très médiatisée, il y a de cela moins d'un an, c'est avec quelques représentations pré-conçues, nourries de commentaires et d'interviews de l'auteur, que j'appréhendais sa lecture. Je m'attendais en effet presque à un ouvrage sociologique, voire politique, traitant de l'extension des banlieues résidentielles en France et du vote extrême. Et bien, c'était vrai. Mais ce constat n'englobait pas toute la richesse de ce roman.

    Les lisières sont certes ici celles des villes, celles des orientations professionnelles pré-programmées en fonction du milieu social d'origine, des bulletins de vote du monde ouvrier en perdition sur les terres d'extrême-droite, la frontisation comme recours ultime et suicidaire au sentiment d'abandon. Mais Olivier Adam arpente surtout ici les champs de l'intime. Car les lisières, ce sont aussi les limites de la santé mentale dans un milieu hostile, celui de la société des hommes. L'organisation de la vie sur la corde raide de la vieillesse. Les affres de l'élévation sociale et de la reconnaissance des proches. La solitude. Le sentiment de solitude. L'extrême complexité des liens familiaux.

    En sillonnant la ville où il a grandi, le narrateur se remémore, les événements, les personnes. Il confronte le passé et le présent, s'interroge, digresse, constate. Cherche à comprendre. Cet entremêlement génère un réalisme stupéfiant, un malaise aussi, et certainement un soulagement immense : un auteur comme Olivier Adam peut écrire un roman foncièrement intimiste en dépeignant son époque. Il est souvent reproché au narrateur des Lisières de vivre en observateur dilettante, distancié et privilégié. Ce reproche ne peut en aucun cas être adressé à Olivier Adam, tant l'acuité de son regard est sublime... et utile.

    Les lisières, Olivier Adam. J'ai lu. 7, 90 €.

    Si vous avez aimé Les lisières, je vous recommande la lecture de Banquises, de Valentine Goby.

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  • Nos vie désaccordées, Gaëlle Josse

    41-kL6it5RL._SL500_.jpgLa recherche de l'accord parfait : pour le musicien, ce sera entre les notes. Pour le commun des mortels, ce sera entre les choix qui s'imposent à lui au cours de son existence. Il est question de ces deux recherches dans ce roman de Gaëlle Josse.

    Dans une boutique d'instruments, un pianiste de renom s'éprend de Sophie, une femme frêle, fragile, radieuse. Mais c'est beaucoup plus tard que débute le roman. Quand il l'a déjà perdue de vue, qu'il a tourné la page pour vivre avec Cristina.

    Entre temps, le couple provisoire aura vécu un drame intime. Pour échapper au poids de la douleur, il aura fui, à sa façon, d'un bout à l'autre du monde pour donner des concerts. Elle sera partie aussi, direction la folie, le lâcher-prise. Et puis l'internement, la séparation de fait, la vie qui semble continuer pour lui.

    Jusqu'au jour où, au hasard d'un courrier d'un admirateur mélomane, il entend parler d'une jeune femme qui écoute sa musique à longueur de journée. Cet admirateur est infirmier psychiatrique, la jeune femme en question est une de ses patientes. Le pianiste va-t-il retrouver le chemin qui le mène à Sophie ?

    L'écriture de Gaëlle Josse est délicate, mesurée, un peu mystérieuse. Comme le sont les réactions de ses personnages. Un roman harmonieux, car en littérature, comme en musique, ce sont les silences qui parlent parfois le mieux.

    Nos vie désaccordées, Gaëlle Josse (France). J'ai lu. 122 pages. 6, 50 €.

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