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  • Eux sur la photo, Hélène Gestern

    lettres,histoire familiale,secretsComment faire parler une image, un cliché en noir et blanc, témoin muet d'une époque ? Hélène n'en a pas la moindre idée, alors elle tente : après avoir trouvé un cliché représentant sa mère dont elle ne sait rien, elle agit comme quelqu'un qui n'a rien à perdre. Elle publie une annonce dans Libération, pas pour retrouver la trace d'un inconnu croisé dans le métro, mais pour trouver des réponses que plus personne autour d'elle ne peut lui donner. Avec cette photo, qui date de près de 40 ans, une coupure de presse, des noms, un lieu. Un faisceau d'indices faible. 

    Mais plus d'un mois après avoir publié l'annonce, un courrier va lui parvenir. Le croisement des données évoque quelque chose à Stéphane. Ensemble, ils vont lier une relation épistolaire et mener leur enquête. Car Hélène n'est pas la seule à ignorer une partie de son histoire, et elle va trouver en Stéphane un allié, un complice, un informateur, un ami...

    Tous les deux, ils avancent à petits pas. Sur le mode désuet de la communication par lettres, même s'ils concèdent parfois quelques mails et SMS, ils prennent le temps, comme avant. Comme à l'époque des mystères familiaux qu'ils souhaiteraient lever. Au prix de découvertes qui peuvent changer le cours de leur vie.

    Hélène Gestern parvient à maintenir un suspens étonnant, car la lenteur de la communication pourrait exacerber l'impatience du lecteur. Au contraire, on rentre lentement et vraiment dans cette histoire, pensant tenir les réponses quand elles s'échappent à nouveau. Avec l'impérieux besoin de savoir qui ils sont, eux, sur la photo.

    Eux sur la photo, Hélène Gestern (France). Arlea poche. 300 pages. 10 €

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  • Jusque dans nos bras, Alice Zeniter

    Ca va vous sembler stupide mais j'ai mis un certain temps à retrouver où j'avais entendu cette bribe de phrase "jusque dans nos bras". Et puis j'ai trouvé, une fois la dernière page de ce roman passée. Oui, la Marseillaise ! Un hymne à la patrie, à l'unité de la nation devant l'adversité (aux paroles saisissantes de... détermination, faut-il le rappeler ? Oui appelons ça comme ça, de la détermination...) Un haka bien stimulant pour résister aux hordes tyranniques et sanguinaires, cette chanson. Bon, c'était peut-être utile au 18ème siècle, on trouvera certainement certains passages un chouilla excessifs en 2013.

    Bref, je m'égare.

    Nous sommes en France, novembre 2013. Notre nation est tellement évoluée qu'une de ses ministres subit publiquement le racisme le plus vil, le plus bas, le plus fétide. Comment en est-on arrivé là ? peut-on légitimement s'interroger. Nous aurions donc la mémoire si courte que nous aurions oublié qu'en 2007, à l'arrivée d'un nouveau Président de la République et de son gouvernement, un "ministère de l'identité nationale" aux relents pétainistes a été créé. Et pendant cette période, des gens ont vécu dans ce pays, avec la peur au ventre.

    C'est ce que rappelle Alice Zeniter dans ce roman très inspiré de l'actualité du quinquennat Sarkozy. A travers les aventures d'Alice et Mad, qui vont faire de leur union le plus blanc des mariages pour tenter de faire passer inaperçue la peau noire de Mad. Les amis d'enfance se jettent à corps perdus, mais pétris de questions, dans cette aventure qui leur semble injuste, mais pas si étonnante, puisqu'elle s'inscrit dans la grande lignée de l'histoire du racisme qu'ils écrivent ensemble depuis les bancs de la maternelle. Depuis le mot "bougnoule", depuis la haine anti-arabe de l'après 11 septembre 2001.

    Avec un humour incroyable, Alice Zeniter réussit la performance de la simplicité de la démonstration sans grand discours. Et nous rappelle qu'un roman, ça peut faire travailler un peu la compassion.

    Jusque dans nos bras, Alice Zeniter (France). Le livre de poche. 192 pages. 6, 60 €

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  • A Suspicious river, Laura Kasischke

    usaIl paraît que les psys appellent ce phénomène la dissociation. Mon corps est un, la réalité est autre. Moyen de défense imparable contre les agressions irréparables. Dans sa ville froide et terne des Etats-Unis, Leïla a bien compris les avantages à tirer d'un tel fonctionnement. Et comme elle se pense vouée à un destin tragique, elle se laisse brûler à petits feux, sans jamais sentir la flamme.

    Dans le motel pourri de Suspicious River où elle est employée, Leïla accueille les clients de passage en chassant les odeurs de moisi infiltrées au plus profond des moquettes. Et puis, un jour, elle fait une passe. Elle se dit que comme ça, elle aura de l'argent le jour où. Elle ne sait pas pour quoi faire, mais en tous cas la machine est lancée, entre sexe et violence, cruauté et fatalité.

    On la voit s'étioler page après page, partir toujours plus loin au delà des limites, abandonner son corps, son âme. Se donner pour s'effacer, s'anéantir. Comme elle, on subit, on attend, sans trop savoir quoi.

    Plongée sans concession dans le cauchemar de l'âme humaine, A Suspicious River communique sa froideur avec une grande efficacité.

    A Suspicious River, Laura Kasischke (Etats-Unis). Le livre de poche. 384 pages. 7, 10 €

    Catégories : Littérature Américaine 0 commentaire
  • Y revenir, Dominique Ané

    51QLSu24f6L._.jpgComment écrire une autobiographie en effleurant juste les personnes et les événements ? Comment exprimer de l'amertume par rapport à son enfance quand celle-ci n'a pas été le théâtre de drames ou de désamours ? Dominique Ané choisit d'évoquer les lieux, juste les lieux. Des lieux boule au ventre, ceux où il a grandi. Pas de misère, pas d'insalubrité, loin s'en faut, mais un sentiment d'isolement, de morne plaine autour de la cité historique de Provins. Alors quand Dominique Ané sera devenu Dominique A., le parolier que l'on connaît pour avoir apporté un souffle nouveau dans la chanson française au milieu des années 90, quand les années auront passé, quand il aura mis cap à l'ouest, il y repensera à cette ville. 

    Au travers de ces lignes, Dominique Ané se fait violence en revenant aux sources, (un peu à la Olivier Adam dans Les lisières, la misanthropie de façade en moins) à l'occasion d'un concert par exemple, en foulant à nouveau les pavés de Provins et les souvenirs qui s'y rattachent. Comme un chemin qui apaise.

    Y revenir, Dominique Ané (France). Points. 93 pages. 4, 70 €


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