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  • Debout-payé, Gauz

    debout payé.jpgDebout-payé, c'est le roman d'un paradoxe : celui de l'invisibilité qui force le respect. L'invisibilité de ces hommes debouts, à l'entrée des magasins, qui surveillent les larcins. Témoins privilégiés de nos habitudes de consommations, de nos attitudes louches, de nos compulsivités acheteuses. Le respect qu'ils inspirent, baraqués comme ils sont, imposants, scrutateurs. 

    Le vigile est debout. Ivoiriens, Sénégalais, Camerounais, ils représentent à aux seuls, dans les boutiques de luxe des Champs-Elysées, l'exil économique forcé. "Envoyez de l'argent au pays", les exhortent les campagnes de publicité de Western Union. Alors c'est ce qu'ils font. Ils ont parfois abandonné là-bas des études de médecine pour vivre dans une chambre de 9 mètres carrés à Paris, qu'il se partagent à plusieurs, par roulements. Ossiri, étudiant Ivoirien devenu vigile après avoir hérité du curieux statut de "sans papier", est de ceux-là. Il narre son quotidien avec distance, humour et analyse.

    Le vigile a un vocabulaire propre, un peu codé, des astuces innombrables, de grandes facultés d'observation des clients et des vendeurs, et beaucoup d'ironie sur la société qui l'entoure, dont il est un rouage étrange, à la fois indispensable et ô combien interchangeable. Alternant glossaire, tranches de vie, notions géo-politiques, flash-backs, citations, et réflexions personnelles, Debout-payé est un roman à multiples facettes.

    Debout-payé, Gauz. Le livre de poche. 216 pages. 6, 60 €

    Catégories : Littérature Française 0 commentaire
  • En cas de forte chaleur, Maggie O'Farrell

    famille, grande bretagne, irlande, canicule"Un temps étrange génère des comportements étranges". Pour ce qui est de la canicule, on pourrait penser au légendaire "Fenêtre sur cour" de Hitchcock. Et on pourra désormais s'attarder sur ce roman de Maggie O'Farrell.

    Eté 1976. Une grande partie de l'Europe crève de chaud et de soif. Le centre de Londres fond littéralement, à l'image de ce goudron transformé en réglisse liquide. Des mesures drastiques sont prises pour éviter les gaspillages ou les vols d'eau. Les corps s'adaptent tant bien que mal, mais les repères évoluent, se confondent. La météo se détraque et avec elle certains comportements vont aussi sortir de la moyenne, de la norme.

    Chez les Riordan, famille irlandaise installée à Londres, c'est la stupéfaction : Robert, le père, a prélevé de l'argent sur son compte et a disparu. Aucun signe précurseur, aucune explication plausible, aucune confidence ne peut expliquer le geste de ce retraité paisible.

    Les trois enfants, éparpillés au quatre coins de Londres ou de New-York vont devoir, à leur corps défendant, se retrouver pour épauler leur mère et mener l'enquête. Pas facile de faire coexister l'enfance et la vie d'adulte, le passé et l'avenir, des personnes qui ont bien du mal à se supporter. Les quatre Riordan, auxquels s'ajoutent les nouvelles générations, vont pourtant faire des concessions, mettre leur vie entre parenthèses pour une durée indéterminée pour retrouver l'un des leurs. Et surtout comprendre cette disparition, dans laquelle les secrets du passé et des origines jouent bien sûr un rôle conséquent. C'est sur un ferry pour l'Irlande que l'aventure familiale se transforme en road-movie. La fraîcheur retrouvée, les pensées et les décisions semblent s'organiser avec plus de facilité pour chacun.

    Maggie O'Farrell avait déjà exploité avec brio les motifs du secret, du lien entre passé et présent et des relations familiales dans l'excellent Cette main qui a pris la mienne. En cas de forte chaleur apporte quant à lui, aussi bizarre que cela puisse paraître, beaucoup de fraîcheur, avec des portraits fins et nuancés et une escapade familiale pleine de tendresse. 

    En cas de forte chaleur, Maggie O'Farrell (Grande-Gretagne). 10/18. 357 pages. 8, 40 €

    A découvrir aussi : Cette main qui a pris la mienne

    Catégories : Littérature Britannique 0 commentaire